Fonction publique

Gestion Prévisionnelle des Ressources Humaines (GPRH) et management dans le secteur public : le rendez-vous manqué

Les secousses qui traversent le secteur public depuis une dizaine d’années, à la fois du point de vue de la raréfaction des ressources et de la chute de sa légitimité ont conduit les administrations à s’interroger sur leur dispositif de gestion des ressources humaines jusqu’alors guidé par le cadre statutaire, garant de la solidité des carrières, et le cadre d’emploi comme système de management.

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La GPEEC : une approche comptable plus que managériale

Les réformes structurelles de l’Etat entrées en vigueur au milieu des années 2000 avec la Lolf (Loi Organique relative aux Lois de Finances) puis la RGPP (Révision Générale des Politiques Publiques) imposent à tambour battant la recherche de marges de manœuvre, de résultats, de performance.  Dès lors la gestion des ressources humaines publiques devient un enjeu majeur non seulement budgétaire mais encore culturel et managérial.

La réponse à cet enjeu fut tout d’abord comptable et mécanique avec la mise en place de la GPEEC (Gestion Prévisionnelle des Effectifs, des Emplois et des compétences). Celle-ci s’attache essentiellement à identifier les plafonds d’emploi et de masse salariale au sein des budgets en indiquant l’ETPT (l’Equivalent Temps Plein Travaillé) comme point de mire des managers publics dès lors comptables de la consommation de leurs ressources  et de la qualité de leurs résultats. La partie prévisionnelle de la démarche se traduit par un exercice statistique complexe ou il s’agit d’anticiper à 3 ans les zones de saturation et les besoins nouveaux par catégorie d’emploi. Le manager public est ainsi supposé identifier sa capacité à déployer de nouvelles compétences au regard de ce schéma prévisionnel. Le résultat de cet exercice apparait derechef essentiellement comptable puisque ces prévisions en ETPT sont traduites en masse salariale.

Parallèlement, une série de textes législatifs et règlementaires ont imprimé la vision des ressources humaines au sein des services publics avec une priorité donnée à la formation individuelle,  tout au long de la vie et la mobilité au sein des fonctions publiques. L’agent de l’Etat prend dès lors sa carrière en main, envisage son employabilité et est évalué sur sa performance individuelle (texte sur la réforme de l’entretien d’évaluation).

La GPRH : une vision stratégique et transversale au sein de laquelle la place du management est peu visible

Devant la difficulté à mener à bien ces réformes et le nouveau contexte déstabilisant devant lequel les agents de l’Etat se trouvent, la DGAFP avec Bercy identifient la nécessité de donner une dimension plus large à la gestion des ressources humaines. La GPRH (Gestion Prévisionnelle des Ressources Humaines) comme réponse donnée, englobe les éléments techniques contenus dans la GPEEC et s’empare également d’aspects plus qualitatifs comme l’approche par métiers et les compétences associées, les plans pluriannuels de formation, le Schéma Directeur des Ressources Humaines (SDRH), la qualité des conditions de travail, la santé au travail, le dialogue social, la politique de recrutement, les éléments de motivations, la diversité et prévention des discriminations… autant de dimensions propres à rassurer l’agent public qui peut se tourner vers son équipe RH pour répondre à ses multiples interrogations sur l’administration transparente et performante, transversale et mutualisée de demain.

La nécessaire prise en compte des « managers de proximité »

Dans le même temps les aspects opérationnels des réformes sont conduits au quotidien par des « managers de proximité » à qui sont confiés des budgets, des équipes, des résultats à atteindre, et le soin de surveiller une batterie d’indicateurs  comme baromètre de leur performance. Les expériences de mise en place de la GPRH n’ont pas encore montré clairement comment ces hommes et ces femmes de terrain étaient accompagnés, formés au management pour prendre en main ce qui leur est demandé et embarquer leurs équipes avec eux. Les quelques tentatives louables d’organisations précurseurs (Caisse des dépôts, Ministère de l’intérieur,…) ne placent pas de manière significative le « manager de proximité » comme point crucial de la réussite des réformes. Pour autant les attentes sont fortes, les différentes missions d’accompagnement qui sont confiées à Demos soulèvent sans ambiguïté les difficultés rencontrées par ces « managers de proximité »  pour se positionner auprès de leurs collaborateurs, souvent ex-collègues, comme relais opérationnels de la stratégie de la direction générale auprès de laquelle ils se sentiraient proches et soutenus. C’est grâce à un travail précis d’immersion, d’alignement et de coopération qu’il est possible de dresser un diagnostic, de définir un cadre de référence et de positionner des parcours de formations-actions adaptées.

La GPRH, dans son ambition stratégique, voire pacificatrice, fait figure de Léviathan en omettant la nécessité impérieuse d’impulser et soutenir des démarches locales, ouvertes sur la particularité des situations managériales et la souplesse des solutions donnant une large écoute aux attentes des « managers de proximité ».